Organisé au Palais Galliera, à Paris, du 28 mai au 11 juillet 1929, le premier salon consacré aux arts de la bijouterie, joaillerie et orfèvrerie entend renouveler le succès remporté par l’Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes de 1925.
« Plus intime », l’espace d’exposition, à l’instar de celui de 1925, est conçu par l’architecte Éric Bagge et vise à « l’égalité parfaite entre [les] maîtres de l’art précieux ». Dans la grande galerie du musée est édifié « un véritable temple du bijou » aux « murs revêtus d’argent et soulignés d’or »1Henri Clouzot, « Au musée Galliera. Les Arts de la bijouterie, joaillerie, orfèvrerie », Le Figaro, supplément artistique, 13 juin 1929, p. 589-591.. « Les maîtres joailliers [y] présentent […] leurs plus récentes créations. » On retrouve chez celles-ci « des tendances communes, celles qui avaient fait leurs preuves en 1925 : simplicité des lignes, élégance des formes, recherche heureuse de la couleur, sobriété, pondération », mais avec davantage d’affirmation : « Loin de s’arrêter, le mouvement [du modernisme] n’a fait que s’accélérer. »2Henri Clouzot, « Au musée Galliera. Les Arts de la bijouterie, joaillerie, orfèvrerie », Le Figaro, supplément artistique, 13 juin 1929, p. 589-591.
Une nouvelle création : le bijou cravate
Le salon comporte également une rétrospective dédiée à la parure bijoutière depuis 1829, qui non seulement donne à voir son évolution depuis un siècle mais permet aussi de constater que « l’arsenal de la coquetterie de 1929 est singulièrement moins fourni que celui d’il y a cent ans. Seul Van Cleef et Arpels présente un genre inconnu de bijou : une grande cravate qui se noue autour du cou et retombe sur la poitrine avec la souplesse d’un ruban3Henri Clouzot, « Réflexions sur la joaillerie de 1929 », Le Figaro, supplément artistique, été 1929, p. 685-688. ».
La prédominance de la joaillerie
Lors de ce salon, Van Cleef & Arpels se distingue également par « d’imposantes parures blanches », qui parfois « [marient] [le diamant] avec des émeraudes » ou « de tendres turquoises », comme en témoigne un autre ensemble de la Maison, composé d’un sautoir, d’une broche, d’un bracelet et de pendants d’oreilles. Toutes en joaillerie blanche, ces quatre pièces se distinguent par leur simplification géométrique et l’usage de « matières moins précieuses4Yvanhoé Rambosson, « Les beaux joyaux du musée Galliera », Comœdia, 27 mai 1929. ».
La pendule Oiseaux
L’art du lapidaire est également célébré avec une magistrale « pièce d’horlogerie digne d’un conte de fée5Ruth Green Harris, « Paris sees interesting Modern Jewelry », New York Times, 11 août 1929. ». Sous une vitrine en verre, deux oiseaux en lapis-lazuli sont perchés sur un bassin reposant sur quatre colonnes en agate. Les « becs indiquent l’heure signalée par des chiffres sertis de diamants6Anonyme, « Detectives Watch Crowds At Exhibt Of Costly Jewelery », The Chicago Tribune and the Daily News, 28 mai 1929, p. 3. » inscrits sur le bord du récipient. Les deux oiseaux peuvent s’animer et font de cette pendule le premier exemple d’une pièce horlogère dotée d’un automate présentée lors d’une manifestation de cette envergure.
Une impulsion stylistique freinée par la crise de 1929
Les organisateurs de ce salon, exclusivement dédié aux arts bijoutiers, joailliers et à l’orfèvrerie, espéraient qu’il restât « plus qu’une impression passagère de goût et de beauté » de cette manifestation. Hélas, les « leçon[s] et [l’]orientation durables7Henri Clouzot, « Au musée Galliera. Les Arts de la bijouterie, joaillerie, orfèvrerie », Le Figaro, supplément artistique, 13 juin 1929, p. 589-591. », ainsi que l’impulsion créatrice qui auraient dû en résulter furent endiguées par le krach boursier, dont les premières répercussions arrivent en France à partir de 1930. Nombre de ces opulentes parures furent de ce fait transformées durant la décennie suivante.