En 1945, la Chambre syndicale de la couture parisienne organise au Pavillon de Marsan, au sein du Musée du Louvre, Le Théâtre de la mode, une manifestation qui entend promouvoir la haute couture et les métiers du luxe.
« Renonçant au traditionnel défilé de mannequins1Chambre syndicale de la couture, Exposition Le Théâtre de la mode, mars-avril 1945, [s.l.n.d.], 1945. », les organisateurs imaginent une présentation de robes de couturiers par de petits modèles de soixante-dix centimètres de haut, conçus en fil de fer2Les poupées sont aujourd’hui conservées au Maryhill Museum, à Washington D.C.. De prestigieux créateurs y participent, parmi lesquels Cristobal Balenciaga, Jacques Heim, Jacques Fath ou Jean Dessès, ainsi que trente-six modistes, vingt coiffeurs, huit bottiers et des paruriers. Telles des poupées, ces « petits personnages parés de grandeur3Louise de Vilmorin, « Au théâtre de la mode », Album du Figaro, printemps 1945, p. 51. », défilent dans des décors de théâtre qui ont été confiés à « des sculpteurs, à des peintres et à des décorateurs4Exposition Le Théâtre de la mode, mars-avril 1945, op. cit. », tels que Christian Bérard et Jean Cocteau. À l’instar des expositions internationales et universelles françaises, cet événement célèbre les industries parisiennes du luxe et promeut leur savoir-faire. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, celles-ci souhaitent retrouver leur aura, ainsi que leur monopole dans le monde de l’élégance.
Le rayonnement de Van Cleef & Arpels aux États-Unis
Afin d’encourager « le rayonnement français5Anonyme, Le Théâtre de la Mode organized by the Chambre Syndicale de la Couture Parisienne, [s.l.n.d.], 1945. » à l’international, Le Théâtre de la mode entame une itinérance à travers le monde, passant de Londres à Barcelone, de Copenhague, à Stockholm ou encore Vienne. Van Cleef & Arpels participe à l’édition new-yorkaise en mai 1946, confirmant sa présence sur le sol américain depuis 1939. À cette occasion, de nouvelles silhouettes sont créées, mises en scène dans un décor également inédit, dessiné par Emilio Terry et André Beaurepaire. Les petits mannequins défilent au sein d’architectures totalement féériques, dont une grotte en rocaille évoquant celles du XVIIe siècle, ou déambulent dans des ambiances de rues parisiennes.
Quand l’opéra Carmen inspire les joailliers et couturiers
La Maison Van Cleef & Arpels collabore avec les créatrices Elsa Schiaparelli et Maggy Rouff. L’opéra de Bizet, Carmen, inspire à la fois le joailler et la couturière. Costume et parures du toréador sont adaptés à la silhouette féminine : sur une robe en satin, au décolleté croisé et au jupon évasé, sont fixées des épaulettes et une ceinture en or jaune. Cet ensemble est complété par une tiare de facture similaire, « portée haut sur la tête afin d’équilibrer la coiffure en chignon bas6Notes relatives à la silhouette d’Elsa Schiaparelli, Paris, Archives Van Cleef & Arpels. ». « Rapportés à l’échelle d’une poupée, la taille et le serti des diamants et des rubis révèlent la maestria des arts joailliers parisiens7Notes relatives à la silhouette d’Elsa Schiaparelli, Paris, Archives Van Cleef & Arpels. ».
La collaboration avec Maggy Rouff
Pour la robe blanche drapée à la grecque de Maggy Rouff, Van Cleef & Arpels réalise un plastron en or jaune serti de saphirs et rubis ovales en serti clos, ourlé d’une frise de festons gravés. Il est accompagné d’une manchette, transformable en quatre bracelets. La robe est ceinturée d’une corde en or jaune, motif qui va connaître un vif succès en inspirant les bijoux de la série Corde, déclinant sous forme de colliers ou de bracelets, une maille d’or torsadée.