Collier
Acquis en 1936 par Hélène Beaumont, ancienne cantatrice et femme du monde, ce collier témoigne d’un retour à la haute joaillerie dans la production de Van Cleef & Arpels et constitue un jalon majeur dans l’évolution des arts joailliers au XXe siècle.
D’une extrême souplesse, cette collerette est formée de maillons quadrangulaires articulés, en platine et diamants taille baguettes. Le tour de cou se double de deux rangs de rubis ovales à l’arrière, s’élargissant en trois rangs ponctués de baguette à l’avant. Un fort contraste s’opère entre la légèreté de la monture ajourée des rubis, sertis sur griffes, et la juxtaposition des rangs de diamants calibrés. Quatre liens stylisés en diamants rythment la longueur du collier.
Le retour à une opulence joaillière
Même si elle reprend les volumes affirmés de l’extrême fin des années 1920, cette pièce est d’une grande nouveauté dans la valorisation qu’elle fait des pierres précieuses. Dans les années 1930, les joailliers continuent « de raccourcir les colliers1Anonyme, « Le romantisme et les bijoux modernes », Vogue Paris, septembre 1930, p. 50. », tendance observée dès 1929, et privilégient dès lors la collerette. Les bijoux de cette décennie se caractérisent également par leurs imposantes proportions. Colliers et bracelets sont « très large[s], se [suffisent] à [eux]-même[s]2Françoise Arnoux, « Le choix d’un bijou », Femina, 1er mars 1936, p. 37. ».
La ligne droite laisse place à la courbe
Sur le plan stylistique, les motifs angulaires et l’omniprésence de la ligne droite dans la joaillerie des années 1920 laissent désormais place aux courbes de rubans stylisés et aux contours semi-sphériques évoquant des éventails. L’enchevêtrement de maillons sertis de diamants calibrés est remplacé par des rivières de gemmes taillées en ovale et ponctuées de baguettes ; et afin de faire oublier la monture, les pierres sont montées sur griffes. Les compositions sont le plus souvent bicolores, témoignant d’une « faveur renaissante [pour les] pierres de couleurs ». Elles opposent ainsi une pierre précieuse, « le rubis, le saphir [ou] l’émeraude […] au diamant, dans le dessin de mosaïques éclatantes3Françoise Arnoux, « Le choix d’un bijou », Femina, 1er mars 1936, p. 37. ». Ce retour à une forme d’opulence joaillière dans la seconde moitié des années 1930 semble particulièrement prisé. Par sa typologie, sa technique et le traitement de ses pierres, ce collier annonce un renouveau stylistique qui marquera les arts joailliers jusque dans les années 1950.